Du côté de la vie
Chronique 4: DES REVES, DES LARMES ET DES PRIERES.
Publié le 12-03-2015 20:03:13 | Vu 590 fois | 14 CommentairesJe peux reprendre le travail sereinement. Pas de mauvaises nouvelles pendant les congés. Certains de mes élèves ont quitté l'hôpital, d'autres comme Junior, sont encore là mais vont bien. A propos de Junior, il partira dans quelques jours. Il passera ensuite une à deux fois par semaine en hôpital de jour et nous pourrons alors continuer son programme scolaire. Liloua aussi a passé les congés dans sa chambre d'hôpital mais n'étant plus en isolement elle a pu circuler dans le service et passer ses journées auprès de l'éducatrice dans la salle de jeux. Elle a rejoint Laetizia, sa copine de dyalise. Elles se sont cachées dans les recoins du couloir. Elles pensent que je ne les ai pas vues. Elles me suivent, sans bruit, à pas de souris, trottinent derrière moi et nous formons une file indienne. De temps en temps, un petit rire contenu, s'échappe. Tout à coup, je me retourne et elles crient, rient s'encourent, se cachent à nouveau. Nous nous quittons devant la porte de la dialyse où elles sont attendues. J'irai les y rejoindre dès qu'elles seront prêtes. Je passe d 'abord chez Nina dans le service d'oncologie. Elle a 15 ans et un lourd passé médical. Cette jeune ado connaît les hôpitaux depuis son plus jeune âge. De ses maladies, elle garde de nombreux handicaps et un gros retard mental. Elle se déplace en chaise roulante. Elle s'approche de moi. - Tiens, tu viens me chercher pour travailler ?, lui dis-je. Elle me répond par un grand sourire qui veut dire oui. Je prépare des exercices de maternelle. Elle reconnaît quelques lettres et compte jusqu'à dix. On entretient ce qu'elle connaît déjà. Nina aime bien travailler. Elle montre fièrement le travail à sa maman qui la félicite. Elle me tient les mains. Elle voudrait que je reste encore avec elle mais je dois absolument me rendre dans une autre chambre. J' ai promis à Christelle de passer chez elle. Il y a des enfants qui se retrouvent dans une misère affective effarante, une solitude qui les dévore. C’est le cas de Christelle, 6 ans. Elle vit depuis plusieurs semaines dans une chambre aquarium. Isolée du monde et de sa famille, elle l’est aussi dans son cœur. A part le personnel du service, elle ne voit pratiquement personne. Elle a collé sur la fenêtre une photo de ses frères et sœurs et passe son temps à raconter des histoires à ses doudous. Quand je rentre dans sa chambre, en ce début d’après-midi, une assiette à moitié pleine traîne sur sa table. Elle n’a presque rien mangé. Le médecin s’inquiète. Elle doit absolument manger, elle ne peut pas perdre de poids. L’éducatrice essaie de lui consacrer plus de temps mais Christelle déprime. Sa famille lui manque. Sa maman lui téléphone tous les jours, elle promet enfin de passer. Elle vient quand elle peut, Christelle va mieux. Mais peu à peu les visites s’espacent à nouveau. Quelques semaines plus tard, elle reçoit du courrier de ses frères et sœurs. Elle me demande de le lui lire. Quelle joie dans son regard. Elle a aussi reçu un dessin sur lequel toute la famille est représentée, sauf le papa. Je ne relève pas. Elle les reconnaît et me dit leur nom, même le sien. Elle raconte leurs jeux, leurs bêtises aussi, surtout celles des autres. Le dessin rejoint la photo sur la fenêtre et toute contente me dicte sa réponse. Elle a décidé de bricoler une carte cœur, qu’on leur enverra. Méticuleusement, elle dessine, coupe, recopie son message. Je pense que ce courrier reçu un beau matin l’a accompagnée et réconfortée chaque jour. Un vrai petit pansement sur son cœur blessé. Une pensée pour les papas. Si je parle souvent des mères, c’est tout simplement parce qu’elles se confient, parlent de leurs sentiments, partagent plus facilement leurs émotions. Quand celles-ci sont trop fortes, elles débordent en larmes. Les pères sont aussi présents mais différemment. Contrairement aux mères, ils taisent leur ressenti mais leur présence n’en n'est pas moins réconfortante et importante pour l’enfant. Certains sont de vrais papas poules. En voici un qui apporte des jeux de construction à son fils. Sur l’appui de fenêtre a déjà atterri un hélicoptère, monté ensemble la veille. Il passe la nuit avec son enfant à l’hôpital, la maman travaille. Certains pères se rendent très disponibles pour leur enfant, d’autres moins, d’autres pas du tout. Cela dépend des familles, de leurs habitudes, de l’argent qui doit rentrer je suppose. Justement, Junior est en pleine conversation téléphonique avec son papa. Celui-ci le prévient qu 'il arrivera en retard. Il doit d'abord se rendre à l'ONE avec son petit frère. J'ai compris cela en entendant la réponse de Junior et j'ai ri. -L'ONE ? Mais je ne connais pas cette ville, moi ! Explications du papa, il raccroche. Je lui demande comment il va. - Je vais bien, mais j'ai plein de choses dans ma tête. Quand je sortirai, je ne rentrerai pas directement à la maison. J'irai d'abord au snack pour acheter un hamburger, des frites et de la limonade ! Après, j'irai au foot. Il trépigne dans son lit mais il sait qu'il devra encore rester quelques semaines dans sa chambre. - L'infirmière propose que tu t'installes dans le fauteuil pour travailler. Tu restes beaucoup trop dans ton lit. Il faut un peu bouger. - Je sais mais je ne peux pas descendre du lit. - Pourquoi ? - Parce que je n'ai pas de culotte ! - Et dans ton armoire ? - Non plus. Papa m'apportera mon linge propre quand il viendra. Il s'est mis au travail. Un moment de grâce. Je n'ose pas bouger de peur de le déconcentrer et lui donner des envies de passer à autre chose. Soudain, il me dit : - Tu entends, mon ventre gargouille. J'ai toujours faim. Et voilà, il fallait s'y attendre ! - Papa va bientôt venir, il va m'apporter des beignets. C'est trop bon. - Mais tu viens de déjeuner ! - Oui mais j' ai encore faim. On arrive au bas de la page. Il gigote. Il prépare quelque chose. Je ne peux m'empêcher de sourire à l'avance. Puis, sa voix me dit : - J'ai mal aux doigts. Bingo ! Cela sent la fin de la séance ! Je me dis qu'après une heure, il peut souffler mais avant, il faut terminer la page. Il soupire, se remet au travail et termine ses exercices. -Merci, félicitations Monsieur ! Devoir terminé ! Justement, la kiné se prépare à entrer à son tour dans la chambre. Elle lui crie depuis le sas : - Un peu de gym maintenant ! - Il faut que j'arrête de me gratter les cheveux. Ils tombent !, dit-il en me regardant. - Ils seront encore plus beaux quand ils repousseront ! Tiens, ton papa est là ! A demain ! Comme on ne peut pas se retrouver à trois dans la chambre, je me rends quelques chambres plus loin chez Rachid, un enfant de 10 ans, souriant malgré sa longue hospitalisation.Tout est calme dans la chambre. Il a bien travaillé. Pendant qu’il range ses affaires il me dit : - Moi, quand je ne me sens pas bien, je prie et ça me fait du bien. Mais ça, c’est quand je suis à la maison parce qu’ici, je n’y arrive pas. - Pourquoi ? - Parce que je ne sais pas comment me mettre, il n’y a pas de place. - Tu n’as pas besoin de place pour prier. Tu peux prier dans ta tête. Toutes les prières sont écoutées, même si tu les dis du fond d’une grotte. On dirait qu’il vient d’entendre une révélation. Grand moment de silence. Je ne peux pas m’empêcher de sourire. - Alors, je vais prier. Puis, il continue : - Normalement, c'est la dernière fois que je suis hospitalisé. Je commence ma phase d'entretien. On se verra à l'hôpital de jour. Beaucoup d’enfants croient en une autre vie après la mort. Certains prient, d’autres pas. Je me souviens d’une petite fille de 7 ans, Cloé. Elle souffrait d’une maladie chronique depuis de nombreuses années. Tous les enfants parlaient de Saint Nicolas et des cadeaux qu’ils espéraient recevoir. Cloé a dit une phrase que je n’ai jamais oubliée. Elle m’avait émue. - Moi, je ne veux pas qu’il m’apporte des cadeaux. Je lui ai demandé de me guérir… pour mes parents. Prier, c'est une vibration du coeur qui nous relie au ciel. Quand nous prions, peu importe à qui s’adressent nos prières. Chacun prie son Dieu, l’invisible ou la lumière mais elles arrivent toutes au même endroit. Elles ne se perdent jamais en chemin. Peu importent les mots utilisés, ce qui compte, c’est qu’ils viennent du cœur. La prière n’est pas nécessairement liée à une religion. Tout le monde peut prier, demander quelque chose qui améliorera sa vie ou celle des autres. Quand nous prions, nous sommes nous-mêmes. Nous sommes notre âme, notre vérité. Nous ne pouvons pas tricher. Je crois au pouvoir de la prière et je pense qu’il faut respecter les croyances de chacun. Nous ne sommes pas tout-puissants. Il faut faire preuve d’humilité face à l’Univers. Nos vies ne représentent que quelques secondes dans l’éternité mais elles ont chacune leur place dans le cosmos. La semaine se termine sur une note positive.. Ce matin, Liloua va bien. Elle pourra rentrer chez elle cet après-midi. Elle a terminé ses devoirs, je m'apprête à partir. - On se reverra mercredi, en dialyse. - Non, Léa, reste encore un peu ! Elle s'agrippe à mes bras de ses petites mains. Je reste encore un peu : un petit jeu, un bisou, à bientôt. Je sors de la chambre et je me sens sur un petit nuage.Je suis tellement contente que ma petite Liloua aille mieux ! Mais cette agréable sensation ne dure pas longtemps. J'arrive sereinement en oncologie lorsqu'il me semble percevoir des gémissements un peu plus loin dans le corridor. Installée dans la salle de jeux avec deux enfants, je ne m'attends pas du tout à la suite des événements. Subitement, un cri déchire le couloir, rebondit contre les murs, explose au plafond et retombe inerte sur le sol. En oncologie, une maman vient d'apprendre que son enfant, sa petite fille de 3 ans est en soins paliatifs. Condamnée... Un mot horriblement lourd pour une aussi petite fille. Un mot qui n'a aucun rapport avec l'enfance. Condamnée pourquoi ? Qu'a-t-elle fait de mal ? RIEN. Choc, injustice, questions sans réponses, fin de l'espoir. Désespoir d'une maman. Comment trouver du sens à la souffrance quand on vous prend ce que vous avez de plus cher ? Mon travail est interrompu par l'irruption d'une autre mère que je connais bien. Elle vient d'apprendre la nouvelle. Le visage défait, elle me lance : - Mais ici, nous sommes en enfer ! Ce n'est pas possible ! Niveau émotionnel maximal, elle craint sans doute la même issue fatale pour son fils. Décompensation imminente. Je fais quelques pas avec elle dans le couloir. Elle parle, pleure, sèche ses larmes. Elle attend les résultats d'examens médicaux qui redéfiniront peut être l'avenir. La journée s'achève enfin. L'air frais me détend. La lumière du soleil joue avec les nuages. Je respire l'odeur du printemps. Laisser mes émotions sur le chemin. Ne pas les emmener dans ma tête jusque chez moi. A la maison, une autre vie m'attend. J'ai deux vies et je ne dois pas mélanger les couleurs de l'une avec celles de l'autre. Je suis vidée. PETITES FEES. Mes élèves sont répartis dans plusieurs salles. Cela m'en fait des trajets ! En fin de journée, pieds en bouillie assurés. J'arrive à l'école, je partage ma nouvelle idée avec mes collègues. - Si on se déplaçait en rollers d'un service à l'autre, on en gagnerait du temps. L'une d'elle répond du tac au tac : - Toi, en rollers ! Quelle catastrophe ambulante ! Une autre ajoute : - Encore une de tes trouvailles !Tu ne tiens déjà pas sur tes jambes, alors en rollers... Tous aux abris ! Rire général. Ambiance légère. Je me tais en prenant mon air « grande offensée ». On se taquine mais je sais qu'elles ont raison. Je tombe dans tous les trous, trébuche sur le seul pavé qui dépasse... La bonne humeur délie les langues et tout le monde a quelque chose à raconter. C'est dans ce joyeux poulailler que débute une nouvelle semaine. Que nous réserve-t-elle ? Il vaut mieux ne pas se poser trop de questions. Devant la chambre de Junior, je me demande ce qu'il va me raconter. Je souris déjà en enfilant le tablier jaune. Encore une histoire de nourriture, un peu de comédie du style mal au ventre ou au petit doigt. Pourquoi pas aux cheveux ? Je le pousse un peu tout en jouant le jeu. Je ne veux surtout pas mettre la pression. Il est important que les moments que nous passons ensemble soient conviviaux. Dès que j'ouvre la porte il me dit : - Tu sais, j'ai rêvé de mon hamburger cette nuit. - Tiens donc. - Mais juste au moment où on me le donnait, je me suis réveillé ! Il me fait rire. - C'est vraiment pas de chance. Ensuite, il me raconte ses exploits au foot. Son imagination l'entraîne hors de sa chambre, par delà l'enceinte de l'hôpital. Evasion passagère. Une bulle d'oxygène. Et quelle joie, son crayon court sur la feuille. Des espaces se remplissent, des chiffres apparaissent. Et tout cela sans se faire prier. Il n'a mal nulle part, même pas une petite crampe au doigt. Je souris. Je pense que cette fois nous sommes bien partis. - Félicitations Monsieur, vous avez bien travaillé ! Je dessine un petit bonhomme qui sourit sur sa feuille. Il sourit aussi. Quelques chambres plus loin, me voilà chez Désirée, une petite fille noire de 7ans. Elle passera bientôt dans une chambre stérile. Les jours précédents ont été un peu difficiles. Nous avons lu des histoires ensemble, elle a dessiné . Aujourd'hui, elle se sent mieux. Terminées les nausées et la température. Elle reprend courage. Son sourire éclaire tout son visage. Elle me montre les livres que son papa a ramenés de son école. Elle sait déjà quelles feuilles je devrai photocopier pour les stériliser. Désirée est en deuxième année. Elle me dit fièrement : - Regarde mes travaux, Léa. De beaux résultats sont inscrits en haut des feuilles accompagnés de « bravos ». Pendant son hospitalisation, c'est son papa qui a mis sa carrière entre parenthèses. Sa maman vient en fonction de ses horaires de travail. Désirée comprend très bien les difficultés d'organisation pour ses parents et ne veut surtout pas leur causer d'autres soucis. Son papa lui explique qu'il doit s'occuper de ses deux petites soeurs et de son frère. Il est l'heure d'aller les chercher à l'école. Le frère attendra encore à la garderie. - Mais pas de problème papa. Tu peux y aller. Ne t'inquiète pas. - Maman viendra ce soir. - Ok papa. Vas-y. Je vais travailler avec Léa. Gros bisous, embrassades, rebisous. J'observe la scène et je me dis que si les anges existent, Désirée est l'un d'eux. Elle est si affectueuse, rassurante, protectrice avec son papa. Une petite fée qui illumine la journée de ceux qui la rencontrent. Elle a placé sur la table une photo où toute la famille est réunie. La photo du bonheur. Ils ont tous l'air heureux. « Désirée », un prénom qui en dit long. Un voeu de futurs parents réalisé. Quand l'enfant grandit dans un terreau sain, qu'il est arrosé d'amour, ses racines sont solides. Et cela ne l'empêchera pas de voler de ses propres ailes le moment venu, bien au contraire. Le soleil inonde la chambre de lumière. En la quittant après du bon travail, je formule le souhait silencieux de leurs retrouvailles. Je me dirige vers l'école à la recherche d'un classeur d'exercices, je ne peux pas tout transporter dans mon sac jusqu'à la fin de la journée ! Au bout, du couloir, j'aperçois Xavier, l'enfant transplanté rénal. Il arrive en courant, tout souriant. -C'est la grande forme !, lui dis-je en l'embrassant. - Tout va bien. Je vais en consultation. C'était prévu. Sa maman me dit qu'il continue son régime. Il a encore beaucoup de médicaments à prendre mais plus de dialyse ! Quelle libération, une vraie renaissance ! Elle est triste pour tous ceux qui sont encore en attente. Elle leur a apporté les bonbons autorisés, ceux qu'ils peuvent manger. Mercredi.Dans la salle d'oncologie, Enzo, un ado de 13 ans me reçoit le visage fermé. Hospitalisation imprévue, moral en baisse. Il est assis dans la salle de jeux. Le travail n'avance pas beaucoup. Il me dit d'un ton abattu : - J'en ai marre. Un an et demi que je suis malade. Pourquoi ça m'est tombé dessus ? Je n'ai jamais rien fait de mal ! Une adolescente, qui nous a rejoints, a tout entendu. Elle s'assied près de lui. Elle est en plein traitement. Chimio, radiothérapie... Elle semble fragile. Elle est frêle. - Moi aussi je suis malade depuis longtemps. Hier, c'était mon anniversaire. J'étais quand même contente. Evidemment , j'aurais préféré le fêter autrement. A la maison, avec mes amis et ma famille comme avant. - Bon anniversaire., lui répond-il. Enzo écoute, elle continue : - Au début de ma maladie, je pensais comme toi. Moi aussi je me demandais pourquoi je méritais ça. J'ai vraiment réalisé quand j'ai commencé à perdre mes cheveux. Pour les filles, ce n'est pas pareil. J'ai pleuré, je ne voulais plus voir personne. J'étais trop moche. Après, j'ai compris que je devais passer à autre chose. Je devais avancer. Quand on accepte, ça va mieux. -C'est vrai mais parfois, on se décourage. J'ai fait une rechute. - Tu sais, ma mère aussi a un cancer. Enzo interdit, ouvre la bouche d'où sort un « Eh, ben » qui en dit long. - Elle est tombée malade un peu après moi. Un petit garçon arrive près de nous. Enzo le prend sur ses genoux. - Ce qui me fait mal au coeur, ce sont les petits. C'est encore plus injuste parce qu'ils sont... petits ! Ensuite, il enchaîne : - Bon, on continue le travail Léa ? - Ah, quand même ! Tu ne m'as pas oubliée ? Sourires. Il se sent mieux. Une fée lui a redonné espoir. C'est le retour du guerrier ! Les parents aussi se découragent parfois. Dans la salle de dialyse, calme plat. Les enfants ont mangé. Laetizia, 6 ans, m'attend. Droite comme un i, ses lunettes bleues sur le nez, elle a déjà préparé ses affaires : cahier de liaison, d'écriture, journal de classe, classeur et plumier. Quel accueil ! Je la félicite ! D'emblée elle me dit : - Tu sais , Léa, on a vu Xavier et il va très bien. - Oui, je l'ai rencontré avant-hier. - Quand est-ce que j'aurai mon rein, moi ? Bénie crie du bout de la salle très joyeusement : - Quand il y en aura un compatible avec toi ! Tu le sais bien. Moi aussi j'attends. Depuis 3 ans ! - Et moi depuis... 2 ans, répond Laetizia. - Moi depuis 10 mois ! ajoute Liloua tout sourire. - Dans cent cinquante ans, je serai toujours là !, continue Bénie en riant. Des enfants arrivés après elles sont partis avant elles. Un peu dur à avaler. Quand Xavier a été greffé, la maman de Laetizia a craqué : - J'espère, j'espère toujours mais rien ne se passe jamais pour mon enfant. Larmes, épuisement, espoirs déçus, vie en suspens. En attendant des jours meilleurs, les filles travaillent très sérieusement.Je les adore ! A l'hôpital de jour,Rachid, l'enfant qui n'arrivait pas à prier dans sa chambre d'hôpital, va très bien. -Je suis retourné à l 'école depuis lundi, me dit-il. Je suis tellement content que parfois je crois que je suis fou. J'ai retrouvé tous mes copains ! Et tu sais, je travaille bien ! Quelle euphorie ! -En tout cas, cela me fait très plaisir de te voir en forme ! Sa maman sourit . Elle m'explique : -Comme il peut aller à l'école, j'ai demandé au médecin, s'il pouvait avoir ses rendez-vous à l'hôpital près de chez nous. Cela nous évitera de faire cinquante kilomètres tous les deux jours. J'aimerais bien qu'il ne rate plus trop les cours maintenant. -On ne se verra plus beaucoup alors !, lui dis-je. -Non, me répond-il en entrant dans la salle de soins. Sa maman me salue et ils disparaissent, en quelques secondes, comme ils étaient entrés dans ma vie, quelques mois auparavant.